À Oullins, les Petites Cantines recréent du lien grâce à la cuisine
Le plus dur, c’est peut-être de franchir la porte la première fois. Mais une fois passé le seuil, il y a de grandes chances que vous reveniez aux Petites Cantines.
« Restaurant participatif à prix libre », la devanture explique succinctement le concept, sur les vitres le planning du mois et les menus de la semaine s’affichent également. Mais pour connaître les Petites Cantines, il faut en faire l’expérience.
Les Petites Cantines, c’est un réseau de cantines de quartier où les convives cuisinent ensemble et/ou partagent le repas qui est à prix libre. Mais plus qu’un restaurant, c’est surtout un lieu de rencontres et d’échanges.
La première Petite Cantine a ouvert ses portes à Vaise en 2016. Depuis, porté par les habitants de différents quartiers, le concept a essaimé dans la métropole de Lyon, et même à l’échelle nationale. Le réseau des Petite Cantines, c’est aujourd’hui une quinzaine de restaurants déjà ouverts et autant en projet.
Les Petites Cantines, c’est aussi un concept qui s’inscrit parfaitement dans l’esprit de la Biennale de l’hospitalité, co-organisée par la Métropole de Lyon du 4 au 10 novembre. Parmi les 90 animations proposées à cette occasion, on retrouvait donc la découverte d’une des cinq antennes des Petites Cantines du territoire.
Alimentation durable
Ce mardi matin aux Petites Cantines d’Oullins, la plupart des participants sont des novices. Hélène, Emmanuelle, Isabel, Yasin, Hilel et Naïm sont collègues, ils sont venus dans le cadre d’un programme de leur entreprise. Christine, elle aussi découvre les Petites Cantines. À partir de 9h30, ces apprentis cuisiniers sont accueillis par Zoé, maîtresse de maison et seule salariée des Petites Cantines d’Oullins. Avec elle Jasmine, en service civique depuis octobre et aujourd’hui elles sont aussi épaulées par Sylvie, présente dans l’association depuis les débuts, Yann qui se définit lui-même comme un « pilier » des Petites Cantines Oullinoises et Margaux, qui vient régulièrement depuis qu’elle a découvert le concept en septembre.
Avant de se mettre aux fourneaux, on fait connaissance. Un tour de table permet à chacun de se présenter et d’expliquer ce qu’il attend de la journée. Partage est le mot qui revient le plus souvent. Zoé explique ensuite le déroulement de la matinée, les règles du lieu. À 12h30, le restaurant ouvrira ses portes, et une trentaine de convives, en comptant les cuisiniers du jour, sont attendus autour des deux grandes tables du 10 rue Fleury.
Au menu ce midi : soupe à l’oignon, tarte miso pomme de terre et mouhalabieh en dessert. À Oullins, les Petites Cantines sont ouvertes de mardi à vendredi et tous les 3es dimanches du mois. La plupart des menus sont végétariens, « déjà, c’est plus facile pour gérer les éventuelles restrictions alimentaires et ça répond aussi notre volonté de s’inscrire dans une alimentation durable », explique Zoé. Ici, on privilégie les bons produits, locaux. 88 % d’aliments sont issus de l’alimentation durable et 284 kilos d’invendus alimentaires sont collectés sur un an.
Partager un repas et des moments
Pendant que Zoé continue d’expliquer le déroulement de la matinée, plusieurs bénévoles de l’association passent pour déposer les courses du jour, ils reviennent du marché ou de la boulangerie qui fournit gratuitement le pain de la veille à l’association.
Mais pas de temps à perdre, cuisiner pour trente personnes ça prend du temps. Des équipes se forment pour chaque plat, des volontaires sont nommés pour différentes tâches : le maître des horloges pour être sûr de ne pas se laisser prendre par le temps, le « maître glouglou » pour s’assurer que tout le monde reste bien hydraté, le maître du compost, chargé d’amener les déchets à la borne, le maître du son pour alimenter la playlist diffusée pendant la matinée etc.
Mains lavées, charlottes sur la tête et tabliers autour de la taille, tout le monde se met au boulot, dans la bonne humeur. Plus que l’ambition de faire un menu trois étoiles, ce sont les échanges et la collaboration qui font la réussite des Petites Cantines.
La première fois que je suis passé devant j’ai eu peur de passer la porte, la deuxième fois, je suis rentré et maintenant, je suis là toutes les semaines depuis presque un an
Yann
«On rencontre plein de personnes différentes, de 3 à 94 ans », souligne-t-il.
Briser la solitude, favoriser les rencontres, sortir de son cercle, c’est la raison d’être des Petites Cantines. « Je suis attentive à ce qu’il y ait une mixité des publics, explique Zoé. Mais à Oullins généralement, cela se fait de manière assez organique ». Certains partenariats avec les associations comme Singa, le centre d’activités de jour (CAJ) le Tremplin de Saint-Genis-Laval ou les Petits Frères des pauvres, permettent aussi de s’en assurer. « C’est génial d’assister à ces échanges ».
Avant d’arriver aux petites cantines, Zoé travaillait dans l’innovation pour la prévention en santé mentale. « Ça m’a donné le goût de la conduite d’ateliers, mais j’étais un peu en quête de sens. Je suis tombée sur l’offre d’emploi des Petites Cantines un peu par hasard, je n’avais pas forcément les prérequis, mais j’avais envie ». Et elle ne regrette pas du tout son choix.
Redonner du pouvoir d’agir
Les Petites Cantines sont ouvertes à Oullins depuis mai 2022, sur l’initiative de Sophie Duclercq et Cédriane Moreau. Sylvie, bénévole très impliquée dans l’association était du projet depuis le début, sollicitée par Sophie, sa voisine.
Aujourd’hui, l’association à Oullins compte près de 1000 adhérents, un conseil d’administration de 12 personnes et une quarantaine de bénévoles réguliers. « Ici, nous sommes organisés sur des cercles de bénévoles sur lesquels Zoé peut s’appuyer, détaille Sylvie. Moi par exemple, je fais partie du cercle approvisionnement qui démarche les producteurs, s’occupe des courses, etc. Il y aussi un cercle communication/évenementiel, un cercle aménagement du local etc ».
En habituée, pendant cette matinée, Sylvie laisse la place aux nouveaux et fait la petite main là où on a besoin d’elle. En permettant à chacun de reprendre la main sur quelque chose de simple : préparer un repas, les Petites Cantines redonnent aussi du pouvoir d’agir à ceux qui en passent la porte. Avant de venir à Oullins, Hélène a découvert les petites cantines à Vaise, « je me rappelle d’une bénévole qui n’avait pas eu une vie facile, les petites cantines lui ont redonné un nouveau souffle. Elle savait pourquoi elle se levait le matin », raconte-t-elle. Au moment de passer à table, la présentation des plats est aussi l’occasion de faire applaudir les cuisiniers du jour.
Et même sans mettre la main à la pâte, les cantines permettent à des personnes qui n’en ont pas toujours les moyens de pouvoir aller au restaurant eux aussi.
Certains sont heureux de pouvoir simplement à leur tour inviter leurs amis au resto
Zoé,
responsable de cantine
Et ici pas de chichi, chacun se sert et sert les autres, débarrasse ses couverts, essuie la table et passe à la plonge. « Et les discussions de vaisselle sont certainement encore différentes que celles qui ont eu lieu autour de la table pendant le repas », note Sylvie. De l’épluche jusqu’à la vaisselle en passant par l’élaboration de la playlist collaborative, aux petites cantines chaque moment est une bonne occasion de créer du lien.
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