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80ème anniversaire de la libération

Discours prononcé par Suzanne BUSDON maire, à l’occasion du 80ème anniversaire de la libération des communes de Diffembach-lès-Hellimer et Hellimer.


Il y a 80 ans, Diffembach-lès-Hellimer vivait les derniers jours de l’annexion allemande.

Mon propos va débuter par la lecture d’un extrait du rapport militaire de novembre 1944 du 134ème régiment de la 35ème Division d’infanterie des forces américaines :

« 21 novembre, le 2ème bataillon avance sur Hellimer avec la force opérationnelle 3 de la 6ème division blindée et après beaucoup de difficulté occupe la ville, détruisant 2 chars et en capturant un 3ème en parfait état. Le 1er bataillon se déplace de nuit dans les environs de Hellimer mais il est considérablement ralenti par les tirs venant de Hellimer.
22 novembre à 15h, le XIIème corps modifie l’ordre de mission de la division afin de poursuivre l’attaque vers le Nord Est. Le 1er bataillon attaque vers Leyviller et après une bataille acharnée se déplace vers Saint Jean Rohrbach.
Le 2ème bataillon se déplace de Hellimer pour attaquer Diffembach et s’empare de la ville après un dur combat. Il se dirige vers la forêt à l’est de Diffembach et y repousse une contre-attaque, infligeant de lourdes pertes à l'ennemi. » Fin de l’extrait.

« Je suis dans notre cave avec mes parents, mes sœurs et nos voisins. Après les bombardements, on entend du bruit en haut. Papa prenant son courage à 2 mains monte les escaliers. La porte s’ouvre, un coup de feu. Mon père est blessé au bras. Les soldats américains ont dû penser que nous étions des Allemands. Nous parlons tous le patois. Mon père est emmené par les soldats. Nous, nous rejoignons les autres villageois dans la cave du presbytère. Je suis inquiète. Ou est papa ?
Je m’appelle Fernande, j’ai 13 ans. »
« Avec ma famille, je suis dans la cave des voisins. Après les bombes, nous sortons. Toutes les maisons sont en feu. Celle de mes grands-parents, la nôtre, celle de M Hochscheid, celle de Véronique, celles des familles Herbeth et Pierlot. En face aussi chez Illy et chez les Bour. Il faut rejoindre les autres là-haut au presbytère. Je m’appelle Marie Louise j’ai 12 ans. »
« Nous entendons les avions. Vite nous devons nous rendre en lieu sûr dans la cave du presbytère juste en face de la maison. Les bombardements se suivent. Dimanche dernier, l’avion est arrivé, la bombe est tombée sur la maison de mon copain Rémi ; il est mort avec sa sœur et sa mère. Que va-t-il se passer aujourd’hui ? Les tirs s’arrêtent. La porte s’ouvre. Une femme crie « Civils, civils, ne tirez pas ! ». Ça y est, les Américains sont là. Je m’appelle René, j’ai 8 ans. »

« Je suis dans la cave avec mes parents, mes 2 frères, ma petite sœur et le bébé. Nos voisins sont avec nous. Il y a le feu à la maison ; il faut sortir, vite. Le voisin prend un chiffon blanc et l’attache au balai. Il sort, nous le suivons. On court vers la maison la plus proche qui n’a pas été bombardée. Les portes sont verrouillées, quelqu’un casse le carreau de la fenêtre et nous nous mettons à l’abri. Plus tard, les soldats américains entrent dans la maison et tout le monde doit se rassembler. Un soldat très grand me hisse sur ses épaules et m’emmène jusqu’au presbytère. Je n’ai pas peur. J’ai 5 ans et je m’appelle Edith. »
Après la nuit passée dans les caves du presbytère et de l’école des filles, les habitants retournent dans leur maison. Ceux dont les maisons ont brulé seront recueillis par des membres de leurs familles. Fernande apprendra plus tard que son père a été évacué vers Morhange puis hospitalisé à Nancy. Il reviendra quelques semaines plus tard.
Ces 4 enfants qui ont vécu la libération de Diffembach-lès-Hellimer il y a 80 ans, je les ai rencontrés ces derniers jours. Ils m’ont rapporté leurs souvenirs simplement, dignement, je les ai écoutés avec beaucoup d’émotion et je les remercie chaleureusement pour leur témoignage.
Je ne peux pas m’empêcher de penser que le père de Fernande et George Lott ont probablement été évacué dans le même convoi sanitaire.
Qui est George Lott ?
C’est un soldat américain qui a été blessé à Diffembach ce fameux 22 novembre. Il a fait l’objet d’un article dans le magazine LIFE et ainsi nous connaissons son histoire. Il était brancardier dans une unité médicale. Avec son équipe ils étaient coincés sous les tirs de mortier allemands. Lors d’une accalmie, il sort de la grange qui sert de base médicale pour venir en aide aux blessés ; les tirs reprennent et il est gravement blessé aux 2 bras. Il sera lui aussi évacué vers Morhange puis opéré à Nancy.
Dans les rangs de la 35ème division américaine, rien que pour le mois de novembre 1944, le bilan est lourd : 303 tués et 46 soldats qui décèderont suite aux blessures, 127 blessés graves, 1422 blessés plus légèrement, 14 capturés et 101 disparus.
 Parmi ces disparus, se trouve le Private First Class Woodrow W Hamilton de la compagnie E du 137 régiment de la 35ème Division. Il disparait au combat dans la nuit du 21 au 22 novembre entre Diffembach les Hellimer et Saint Jean Rohrbach lors d’une mission d’éclaireur.
Private George Lott, Private First Class Hamilton, vous êtes des héros, nos frères, des héros américains aujourd’hui reconnus par la République Française.
Aujourd’hui, c’est un grand honneur qui m’est fait de pouvoir rendre hommage à ces 2 jeunes soldats qui ont quitté leur patrie et leur famille pour traverser l’océan Atlantique et venir se battre pour vaincre la barbarie nazie, libérer la France et au-delà de la France, toute l’Europe. 80 ans après, nous vous rendons hommage et nous vous exprimons la gratitude du peuple français.
On évoque bien souvent le débarquement sur les plages de Normandie en juin 1944 et la libération de Paris 2 mois plus tard, mais il faudra 6 mois aux forces alliées pour libérer l’est de la France dans la boue, la pluie, le froid sur un terrain difficile face à une opposition forte. Hellimer et Diffembach ont été libérés le 22 novembre 1944 mais Forbach ne le sera que le 14 mars 1945.
En ce jour nous aurons également une pensée pour les victimes de nos 2 villages, les soldats morts au combat, les malgré nous enrôlés de forces par l’armée allemande dont certains ont combattu sur le front russe et qui n’en sont pas revenus, les personnes décédées en déportation ; tous les « Morts pour la France » militaires et civils.
Vous, les enfants et les jeunes ici présents nous vous chargeons d’entretenir la flamme du souvenir que le peuple français entretient de génération en génération. Ne la laissez pas s’éteindre.
Nous voudrions fêter la libération dans la même liesse que les Français au matin du 8 mai 1945. Et oublier que la guerre gronde aux portes de l’Europe et au Moyen Orient.
Mon vœu le plus cher serait que chacun d’entre nous œuvre pour la paix pour que le mot guerre disparaisse définitivement de tous les dictionnaires de la planète.
« Quand les hommes vivront d’amour
Ce sera la paix sur la Terre,
Les soldats seront troubadours mais,
Nous, nous serons morts mon frère. »


Merci pour votre attention